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Le Lundi 5 octobre 2015 à 18:25

Le colistier de Gérard Onesta, René Revol, ne lâche pas Montpellier journal


Des nouvelles des poursuites du maire (Parti de gauche) de Grabels – et grand ami de Jean-Luc Mélenchon – contre moi. Pourquoi j’ai décidé de ne plus me refaire représenter par un avocat et pourquoi le combat est inégal. Et qu’en dit Gérard Onesta, la tête de liste (ELLV – Front de gauche) aux régionales de décembre, liste sur laquelle est annoncé René Revol ? Il botte en touche. Non sans avoir préalablement salué « avec beaucoup de chaleur et d’amitié », l’élu du Parti de gauche. (1 600 mots)

Par Jacques-Olivier Teyssier

 Gérard Onesta (EELV) et René Revol (Parti de gauche) le 5 octobre 2015 à Montpellier (photo : J.-O. T.)

On a beau apparaître dans le même livre, on peut ne pas être d’accord sur tout. Dans Informer n’est pas un délit (1), ouvrage collectif auquel j’ai participé, Fabrice Arfi (Mediapart) écrit : « Je n’ai aucun problème à répondre de mes écrits devant la loi – c’est bien la moindre des choses. Rien ne pourrait justifier qu’une profession en général, et le journalisme en particulier, échappe à sa propre responsabilité. »

« Faire plier le journaliste. Le fatiguer. L’user »
Ou plus précisément : je ne suis que partiellement d’accord avec cette phrase. Et d’ailleurs Fabrice Arfi qui a dirigé l’ouvrage sans doute aussi. Puisque quelques chapitres plus loin, Benoît Collombat (France inter) et Denis Robert (documentariste) racontent comment un harcèlement judiciaire peut se transformer en enfer. Ainsi le second décrit (p 54) : « On ne porte pas plainte pour gagner ou parce qu’on est diffamé. On porte plainte pour vous étouffer. La justice ne sert plus à rendre la justice mais est instrumentalisée pour faire plier le journaliste. Le fatiguer. L’user. »

Loin de moi l’idée de me comparer à ces deux monuments du journalisme d’enquêtes ni de mettre un signe égal entre les affaires Bolloré ou Cleartream et René Revol. Mais comme je l’ai déjà expliqué, quand un homme politique utilise l’argent public pour réclamer un an de salaire à un journaliste précaire, si ce n’est pas pour le « faire plier », « le fatiguer », « l’user », alors c’est pourquoi ? « Pour se défendre », répondent les chiens de garde de René Revol. Il est bien sûr normal que les journalistes répondent de ce qu’ils ont écrit mais pourquoi demander des sommes aussi importantes ? D’autant que :

  1. René Revol ne remet pas en cause les faits que j’ai rapportés mais évoque des « insinuations » – qui restent à prouver ;
  2. Il a bénéficié de la publication d’un long droit de réponse alors que celui-ci était diffamatoire à mon encontre (ce n’est pas un problème, vive la liberté d’expression d’autant que j’ai pu y répondre).

Je dois me défendre avec mes modestes moyens
Rappelons que l’attaque est facile pour René Revol : tous ses frais de justice sont pris en charge par la commune et il peut s’appuyer, si nécessaire, sur l’administration municipale notamment sur son cabinet et sa juriste. En face, je dois me défendre avec mes modestes moyens, mon seul temps et ma seule énergie qui sont, par définition, limités. Et ce n’est pas sans conséquence même en cas de victoire.

En effet, la loi prévoit que la partie perdante peut avoir à payer « une indemnité qu’elle détermine au titre des frais non payés par l’État et exposés par celle-ci ». Sauf qu’à en croire un avocat, la somme allouée est souvent au mieux aux alentours de 1 500 € alors que les seuls frais d’avocat sont environ au moins deux fois supérieurs. Pour la seule première instance. Car qui nous dit que, fort des moyens de sa commune, René Revol ne fera pas appel, n’ira pas en cassation qui pourrait renvoyer en appel ? Et en matière de cassation, si j’ai bien compris l’avocat est obligatoire et très cher.

Convaincu que je vais gagner
Dans ces conditions, j’ai décidé, pour l’instant, d’assurer moi-même ma défense car mes revenus ne me permettent pas de me payer un avocat. D’autant que même en cas de victoire – et je suis convaincu que je vais gagner – je risquerai d’y perdre de l’argent ! J’en suis déjà en frais d’avocat et d’huissier à près de 600 € soit presque un mois de salaire.

Bref, René Revol serait gagnant dans tous les cas de figure. Inutile de souligner que je ne souhaite évidemment pas consacrer mes économies personnelles à cela. Cette décision n’est évidemment pas sans conséquence : je devrai réaliser le travail qu’aurait fait un avocat et passerai donc moins de temps à enquêter. Sur René Revol et sur les autres. Donc René Revol est gagnant dans tous les cas de figure.

René Revol me diffame
Le maire Parti de gauche l’est d’ailleurs depuis le départ. En effet, il me diffame en conseil municipal sachant parfaitement qu’il y a peu de chances que je l’attaque. Et si je le fais, cela ne lui coûtera rien puisqu’à nouveau ses frais d’avocats et de justice seront sans doute pris en charge par la commune de Grabels. Y compris s’il est condamné. En effet, on voit mal sa majorité lui refuser un tel vote. Bref, compte tenu de la différence de moyens, un procès à Montpellier journal équivaut sans doute à 20 ou 30 procès faits à France Inter, à une maison d’édition ou à n’importe quel « grand » média.

René Revol m’a diffamé en conseil municipal ? Eh bien, souvenez-vous, le maire déclarait le 23 février : « Je vais dire quelques mots, que je pèse évidemment [sic] puisque c’est engagé dans une procédure judiciaire. J’ai été diffamé par le dirigeant d’une société civile immobilière. La justice a conclu à la diffamation. Cela a été reproduit dans des publications malgré ce jugement qui n’a jamais été spécifié et notamment ça a été reproduit dans la publication sur le net d’un blog qui s’appelle Montpellier journal et qui est dirigé, rédigé, écrit par M. Jacques-Olivier Teyssier. M. Jacques-Olivier Teyssier n’est pas journaliste, il n’a pas de carte de presse, il tient un blog payant et il se spécialise dans la sortie de soi-disant affaires qui permet de développer son activité mercantile [re-sic]. Dans ce cadre, il a été amené à faire une publication qui s’appuie sur des faits faux et que je vais naturellement attaquer. […] Je vais porter plainte au civil pour diffamation et au pénal pour dénonciation calomnieuse et je ne me laisserai pas faire. Il y va de la moralisation de la vie publique [re-re-sic]. »
Écouter le son :

C’est faux
En quoi René Revol m’a diffamé ? D’abord il affirme que le jugement dont il parle n’a « jamais été spécifié ». C’est faux, il suffit de lire l’article concerné où il est écrit : « Ajoutons qu’Abdelhakim Nacer a été récemment condamné pour diffamation envers René Revol et qu’il n’a visiblement pas pu prouver que ce qu’il avait dit contre René Revol à propos de cette affaire, à quelques jours du premier tour des municipales de 2014, était vrai. »

Ensuite, René Revol affirme que mon article « s’appuie sur des faits faux ». On attend toujours que René Revol disent de quels « faits faux » il s’agit. Car ni dans son droit de réponse ni dans sa citation devant le tribunal correctionnel, il ne les précise. Étonnant. D’autant que ce droit de réponse et cette citation ne concernent nullement l’article sur l’affaire avec ce « dirigeant d’une société civile immobilière » pour lequel Montpellier journal n’a reçu ni droit de réponse ni citation devant le tribunal. Lire : Plainte pour « corruption », immobilier, inondations : René Revol sur la sellette René Revol avait pourtant affirmé qu’il y avait « beaucoup d’erreurs » dans cet article. On attend toujours qu’il nous envoie les rectifications.

Une prétendue « dénonciation calomnieuse » sortie de nulle part
Enfin, en conseil municipal il avait évoqué une prétendue « dénonciation calomnieuse » dont on attend toujours qu’il nous explique d’où il la sort. Heureusement, René Revol disait vouloir peser ses mots. Qu’en aurait-il été s’il ne les avait pas pesés ? Reste que René Revol a également gagné dans un autre domaine – et c’est vrai pour toute plainte en diffamation. Une telle action en justice permet en effet d’installer le doute dans la tête du lecteur sur le mode : s’il porte plainte c’est qu’il y a une raison et que tout ne doit pas être vrai. Mais ce n’est pas tout : en mélangeant deux affaires déjà complexes, René Révol a répandu un brouillard à décourager un lecteur doté de la meilleure volonté.

Sur le fond, il n’en reste pas moins que René Revol a laissé partir dans les mains d’un privé un terrain qui sera rendu constructible alors que la commune avait toutes les chances de l’emporter devant la justice. Pire et fait rare : la justice a confirmé a posteriori que la commune de Grabels l’aurait emporté (lire : René Revol contredit par des décisions de justice 1/3) ! Et ça, c’est incontestable et René Revol n’a d’ailleurs pas contesté ce dernier article.

Où en est-on de la procédure ?
Pour les lecteurs intéressés sur l’avancement de la procédure : le 17 septembre a eu lieu une audience technique où le juge a renvoyé l’affaire au 10 décembre. Et il n’est pas du tout sûr qu’elle soit jugée à cette date. Mais à chaque fois, je perds plus d’une heure en déplacement, attente, etc. Sans compter l’énergie dépensée dans des moments pénibles. René Revol quant à lui, envoie son avocat payé par l’argent public et ne semble pas avoir l’intention de faire marche arrière. Donc vivement les juges !

Et puis voilà que le 5 octobre, Gérard Onesta déclare en conférence de presse que René Revol sera présent sur la liste qu’il conduit. Sans doute pas en position éligible mais pour « pousser la liste » selon l’expression consacrée. Gérard Onesta déclarera même qu’il veut « vraiment saluer avec beaucoup de chaleur et d’amitié » René Revol.

Mais que pense Gérard Onesta du fait que René Revol attaque Montpellier journal et lui réclame un an de salaire. Sur l’attaque, il dit qu’il « ferai[t] la même chose ». Et sur l’année de salaire réclamée ? N’aurait-il pas été préférable de demander une somme plus faible ? Gérard Onesta botte en touche. Mais de pondérer : « Je ne suis pas pour la disparition d’un quelconque journal dût-il me traîner dans la boue. » Bref il est pour la cause mais contre la conséquence. Bel exercice d’équilibriste.
Écouter l’intégralité de l’échange (2’40) :

Rendez-vous dans quelques semaines pour parler des promesses de la liste EELV-Front de gauche lors de cette campagne des régionales. Car ceci nous intéresse aussi beaucoup et ce n’est pas triste.

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(1) Calmann Lévy, septembre 2015, 234 pages, 17 €

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4 commentaire(s)

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  1. Philogm said
    on 5 octobre 2015

    à 19 h 28 min

    Effectivement, René Revol, qui se serait bien vu tête de liste pour le département, ne le pouvait pas: être élu serait contraire à la Charte éthique que chaque candidat du Projet en Commun doit signer. Charte largement inspirée par le PG… Il aurait été peu crédible en effet…

    Sinon, ce n’est pas uniquement une liste EELV-FDG, car le POC et la NGS (que de sigles….) ne sont membres ni de l’un ni de l’autre des partis cités (je mets de côté les « société civile » qui sont souvent fort proches de l’un ou de l’autre des partis des listes.

    Avantage du procès: M. Revol finira peut-être par comprendre, avec d’autres, que la carte de presse ne fait pas toujours le journaliste, et son absence ne fait pas un non-journaliste…

    Et si ça pouvait transformer l’activité de Jacques-Olivier Teyssier et Lucie Lecherbonnier en activité véritablement « mercantile », ce serait un progrès, non?
    ;-)

  2. gilles said
    on 5 octobre 2015

    à 20 h 32 min

    Rene Revol..pousse la liste…dans le vide…
    Alea Jacta Est..

  3. Jacques-Olivier Teyssier said
    on 5 octobre 2015

    à 22 h 05 min

    Excellent gilles !

  4. Jacques-Olivier Teyssier said
    on 5 octobre 2015

    à 22 h 06 min

    On reparlera de la charte dans quelques semaines.