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Le Mardi 7 avril 2015 à 19:38

René Revol contredit par des décisions de justice (1/3)


Un jugement de la cour d’appel de Montpellier du 21 avril 2009 et un autre du tribunal administratif du 19 mars 2015 donne une vision différente de certaines déclarations du maire (Parti de gauche) de Grabels dans deux affaires d’urbanisme déjà évoquées par Montpellier journal. (1 120 mots)

Par Jacques-Olivier Teyssier

Entête de la décision de la cour d'appel de Montpellier du 21 avril 2009 concernant la commune de Grabels et la SCI Jonchris

René Revol, en tant que maire, a-t-il pris les meilleures décisions pour sa commune dans deux affaires d’urbanisme ? C’est pour fournir des éléments de réponse à cette question que Montpellier journal a publié deux articles relatifs à ces affaires sur la commune de Grabels (lire ici et ici). La première concerne deux parcelles vendues en 2011 par Jean Teillard à la SCI Jonchris, représentée par Georges Schwertz. Ce dernier est un chef d’entreprise qui a confirmé à Montpellier journal avoir « donné un coup de main » à René Revol lors de la campagne des municipales de 2008 et avoir réalisé des travaux dans la maison du maire. Bref, les deux hommes se connaissent bien.

Préemption
En 2001, la commune de Grabels, alors dirigée par Bernard Prunet (divers droite), décide d’exercer son droit de préemption sur les parcelles vendues à Georges Schwertz. Ce dernier décide de contester devant le tribunal de grande instance la décision de préemption de la commune. Le tribunal lui donnera tort dans une décision du 22 janvier 2008 et ordonnera le « transfert de propriété desdits biens à la commune de Grabels ». Georges Schwertz et Jean Teillard feront appel de cette décision le 25 février 2008.

Moins de trois semaines plus tard, René Revol gagne les élections municipales puis succède officiellement à Bernard Prunet le 22 mars. 11 mois plus tard, le nouveau maire soumet à son conseil municipal le principe d’une transaction entre la SCI Jonchris et la commune. Le principe est le suivant : la commune récupère une partie des terrains et la SCI retire son appel. Nicole Ansidéï, alors conseillère municipale d’opposition, interroge le maire en ces termes (p 13 du procès verbal du conseil municipal du 27 février 2009) : « Quel est le projet de la commune qui présente, aujourd’hui, une telle urgence pour que vous sentiez un danger au niveau de l’appel. Il n’est pas suspensif certes, mais pourquoi ne pas attendre la décision du tribunal ? Pourquoi au lieu d’acquérir les deux hectares et demi de la totalité du terrain au prix de la préemption, le choix a été fait d’en prendre qu’un quart, alors que le reste est potentiellement la propriété de la commune ? Il est vrai que Monsieur Schwertz est venu à de nombreuses reprises tenter de négocier, faire des propositions et des marchés. Elle ne voit pas la motivation d’une telle urgence. »

« C’est notre avocat qui nous l’a conseillé »
Le maire avance alors deux arguments : il a l’idée, « sans que les choses soient actées, de créer des jardins familiaux » sur le terrain récupéré. Deuxième raison : « Le maire répond que nous ne sommes pas des experts du recours judiciaire et qu’à chaque conflit, il préfère trouver des solutions (1) […] nous préférons négocier plutôt que de passer par des années de procédure. » En résumé : un tien vaut mieux que deux tu l’auras. Et René Revol d’affirmer à Montpellier journal il y a quelques semaines : « C’est notre avocat qui nous l’a conseillé. » Ou encore : « Je n’avais pas d’autres solutions. » Et enfin : « Pour faire ces jardins familiaux et les faire assez vite, j’ai passé ce protocole. » Notons ici une petite contradiction entre la nécessité de faire « assez vite » ces jardins alors qu’en conseil de février 2009, René Revol disait que les choses n’étaient pas « actées ».

Lors de notre enquête, on se disait qu’il était très difficile de savoir si la décision de René Revol avait été la bonne. En effet, la transaction signifiait, par nature, qu’il n’y aurait pas d’appel et donc on ne saurait jamais si ceux qui disaient que la commune avait toutes les chances de l’emporter en appel et donc de récupérer la totalité des terrains, avaient raison. Sauf que. Sauf que Montpellier journal s’est procuré la décision de la cour d’appel de Montpellier qui acte le désistement de la SCI Jonchris. Au départ, il s’agissait d’une vérification de simple routine. Mais la décision s’est révélée plus intéressante qu’on l’aurait pensé.

« La vente doit être annulée »
Car les juges ne se sont pas contentés d’acter le désistement de la SCI, ils sont aussi revenus sur le fond de l’affaire en écrivant (p 6) : « Par des motifs que la Cour adopte, les premiers juges ont fait une exacte appréciation des faits de la cause ainsi que des moyens et prétentions des parties auxquels ils ont pertinemment répondu […] de telle sorte que […] la vente devait être annulée. » Bref, la cour d’appel valide le jugement de première instance et dit que les terrains auraient dû revenir à la commune (lire l’intégralité de la décision de première instance et d’appel ci-dessous). Donc si on se base sur cette décision, on peut considérer que René Revol a pris une décision défavorable à sa commune. Reste à savoir pourquoi. A-t-il été mal conseillé par ses avocats ? A-t-il mal évalué les arguments juridiques ? A-t-il menti ? Si l’on a bien compris ses déclarations, il faudrait pencher pour la première hypothèse.

Restait bien sûr encore une possibilité pour la SCI de se pourvoir en cassation. Ce qui, en cas de recevabilité de la demande, aurait allongé les délais d’une bonne année si on prend comme référence les délais des décisions rendues à cette époque (lire par exemple ici et ici). Et encore plus si la décision avait été cassée. Mais, il restait néanmoins toujours pour la commune, la possibilité, à tout moment du processus judiciaire, de négocier avec la SCI. Comme René Revol l’a d’ailleurs fait avant l’appel.

L’argument du gain de temps
Le maire a également avancé l’argument du gain de temps permis par le protocole d’accord conclu avec la SCI. Cet argument aurait été valable en cas de pourvoi recevable et victorieux en cassation mais pas vraiment si on se limite au délai de la cour d’appel. En effet celle-ci a rendu sa décision le 21 avril 2009 alors que le protocole a été soumis au conseil municipal le 27 février 2009 et que les jardins familiaux ne sont sortis de terre qu’en… 2011.

Rappelons enfin, comme déjà écrit, que si la justice avait donné raison, en appel ou en cassation, à la SCI (qui aurait donc ainsi conservé la propriété des terrains), la commune gardait toujours un autre atout pour négocier : la promesse d’une modification du Plan local d’urbanisme (PLU) pour rendre constructible une partie des parcelles de la SCI contre la cession à la commune d’une autre partie pour les jardins familiaux. Cette modification du PLU était d’autant plus possible qu’elle a été réalisée en octobre 2013 et que la SCI est maintenant propriétaire d’une parcelle constructible sur laquelle elle peut réaliser de nombreux logements. Une bonne affaire. Que René Revol qualifie pour sa part de « rationalisation d’un document d’urbanisme ».

___________
(1) Soulignons que dans un autre affaire qui l’oppose à la SCI Majorelles, René Revol ne semble pas suivre cette ligne de conduite tant les contentieux devant les tribunaux sont nombreux concernant ce dossier.

Lire aussi :

René Revol contredit par des décisions de justice (2/2) http://www.montpellier-journal.fr/?p=23567


Publié dans Accès libre, Politique. Mots clés : , .

4 commentaire(s)

Suivre les commentaires de cet article

  1. pepito said
    on 8 avril 2015

    à 8 h 29 min

    Hé bien cette fois ci les choses sont claires, le conseil municipal de Grabels de 2009, a appauvri la commune de la valeur de ce terrain au profit de la SCI Jonchris.
    Préjudice décuplé en 2013 lors du passage en constructible de ce terrain selon le nouveau PLU.

    Il est vraiment étonnant que la cupidité de la SCI JONCHRIS a gagné sur la prudence dans cette affaire, puisque l’appel n’a pas été abandonné contre le notaire afin de gratter le remboursement des frais de justice auprès du notaire, qui chacun sait doit garantir l’efficacité de son acte. Las, cela obligeait le juge à statuer sur le fond pour savoir si l’acte était efficace ou non.

  2. pheymes said
    on 8 avril 2015

    à 9 h 08 min

    Toujours très instructifs ces documents ces jugements que vous reproduisez.
    La décision qu’a prise René Revol dans sa transaction avec la SCI Jonchris a empêché la commune et donc les grabellois de disposer d’un vaste espace naturel de 3 hectares à proximité d’un autres espace naturel qui fait la fierté des grabellois (le site de l’Avy)…alors que le maire précédent avait fait, sur le plan procédural, ce qu’il fallait pour rendre cet espace public comme la loi le lui permettait…et qu’il était quasi certain de gagner tant la faute du notaire de la SCI Jonchris était patente selon le juge.
    Renonciation donc à un vaste espace naturel public au bénéfice d’un propriétaire privé qui a étendu de manière considérable son propre espace privé de loisirs et de détente ….en attendant donc que, oh divine surprise, quelques années plus tard, une partie de ce terrain devienne fortement constructible de par la seule décision de rené revol et/ou de sa majorité municipale de 2013
    Eclairant !!

  3. pepito said
    on 8 avril 2015

    à 10 h 20 min

    Pauvre notaire, qui a dû gagné 200 euros sur une vente à 10 000 €, qu’il a passé pour faire plaisir à son client et qui se trouve poursuivi par ce dernier au titre de l’article 700.
    C’est plus que de l’ingratitude.
    Cela me laisse songeur, sur la suite des évènements. si ça tourne au vinaigre, ça va être chacun pour soi et dieu pour tous.

  4. anatole said
    on 8 avril 2015

    à 14 h 30 min

    Bravo! L’éventail des faits est désormais ouvert. A réponses pipeau questions en cascade.
    Conseillons la lecture des « Constitutions » de Spinoza car Mr Revol lit aussi cet auteur.