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Le Mercredi 3 février 2010 à 17:47

Les contorsions d’Éric Andrieu, un socialiste « légitimiste » avec Frêche


Candidat malheureux face au frêchiste Didier Codorniou au début de l’automne, le premier secrétaire de la fédération PS de l’Aude a voté, hier, contre l’investiture pour les régionales d’Hélène Mandroux par le Bureau national du Parti socialiste. De plus, interrogé par Montpellier journal le 23 janvier, il déclarait ne pas exclure d’être vice-président de Georges Frêche même si « ce n’est pas une priorité » pour lui. En revanche, pendant sa campagne pour la fonction de « Premier des socialistes » en septembre, il avait été très incisif envers les méthodes clientélistes du président sortant mais aussi sur sa gouvernance. Éric Andrieu s’était même interrogé sur un éventuel objectif « électoraliste » ou « stratégique » « des dérapages » de Georges Frêche.

Éric Andrieu a donc voté contre l’investiture d’Hélène Mandroux, hier en Bureau national du PS. Montpellier journal l’a sollicité pour recueillir une explication de son vote. Sans succès pour l’instant. Il semble clair, en tout cas, que le premier secrétaire de la fédération PS de l’Aude a choisi, pour l’instant du moins, de privilégier le vote des militants du Languedoc-Roussillon contre la direction nationale de son parti.

« Qu’on arrête les pressions inacceptables,
qu’elles le soient à l’emploi, aux subventions,
au placement en crêche »

C’est ce même vote militant qu’il acceptait le 2 octobre après sa défaite face à Didier Codorniou, candidat frêchiste au poste de « Premier des socialistes » pour les régionales. Tout en étant lucide. Pendant sa campagne, d’abord. Ainsi, à Montpellier (place Jean Jaurès, 15/09), il demandait « qu’on arrête les pressions inacceptables, qu’elles le soient à l’emploi, aux subventions, au placement en crêche, etc. »

« Je partage la démarche de Martine Aubry
sur la rénovation »

Au Club de la presse (29/09), il analysait la situation du PS : « Un grand nombre d’élus se sont « notabiliarisés ». À côté de ça, avec eux, il y a ceux que je qualifierais d’alimentaires parce que les collectivités, certains élus sont employeurs. Il y a un clivage dans ce parti entre ceux qui sont dans l’instrument de parti et qui vivent de la dynamique politique et puis les vrais militants qui, eux, sont conscients des enjeux politiques et qui ont les valeurs chevillées au corps, qui ont envie de s’exprimer, d’échanger, de construire collectivement. Cette scission entre ce parti dit archaïque et un parti que je qualifierais de moderne – même s’il faut prendre le mot avec précaution – est en train de se révéler. Je vous dit avec force et conviction que la dynamique est en train de se créer dans cette région et que c’est un bel exemple de démocratie. Je formule le voeu que ce qui se passe là [sa candidature], puisse essaimer au niveau national. Et en cela, je partage la démarche de Martine Aubry sur la rénovation, sur les questionnaires qui nous sont proposés, sur les enjeux de réinvestir le fond politique, de préparer 2012 au regarde de ce fond politique. C’est de ça dont il est question dans cette élection du 1er octobre. »
Écouter le son :

Il était tout aussi lucide au lendemain de sa défaite du 1er octobre. Les pressions ont-elles eu un impact sur le résultat, interroge Montpellier journal ? Réponse : « Oui, bien sûr. Dans les appareils politiques, c’est un peu le mode de fonctionnement. C’est intéressant à lire puis inquiétant. [...] Oui, il y a eu des pressions, des coups de téléphones partout. » Pourtant l’écart entre les deux candidats est important (6386 voix pour Codorniou, 3239 pour Andrieu). Les pressions ont-elles pu faire basculer la balance ? Réponse : « Bien sûr c’est évident. »
Écouter le son :

« Je ne participerai pas
pour des raisons électoralistes
à des stratégies qui consisteraient
à aller capter des voix du Front national »

Le 25 janvier, salle Pétrarque, le premier fédéral audois portait un jugement sévère sur Georges Frêche et ses « propos, des dérapages – je ne sais pas comment il faut les appeler » : « On a été solidaires. J’ai été le premier secrétaire fédéral à écrire à tous mes militants, j’ai fait des réunions dans les sections, parce que je suis loyal, fidèle contrairement aux rumeurs qui circulent. J’ai fait la même démarche au moment des « Blacks ». Et puis il y a les propos sur les Algériens et la prise de position du président de région par rapport aux propos de Brice Hortefeux : « Voilà un préalable qu’un premier des socialistes régional doit poser dans la discussion et la négociation demain avec le président sortant. Cette approche est-elle due au hasard ? Est-ce stratégique ? Électoraliste ? (1) Je ne participerai pas pour des raisons électoralistes à des stratégies qui consisteraient à aller capter des voix du Front national. En préalable, je demanderai de préciser ces questions-là. »
Écouter le son :

« Il faut distinguer justice et morale »

Enfin Éric Andrieu, était aussi revenu ce jour-là, au détour d’une phrase, sur l’exclusion du PS de Georges Frêche : « On me dit souvent : « Oui mais la justice…(2) » Oui mais il faut distinguer justice et morale. »

Sur la gouvernance, celui qui est aussi vice-président de la région, décrivait le 29 janvier les problèmes de fonctionnement de la majorité du conseil régional et du groupe socialiste : « La question de la région aujourd’hui c’est que le groupe socialiste ne se réunit pas ou, s’il se réunit, c’est pour dire : « Voilà l’ordre du jour de la prochaine session. » Il n’y a pas de débat au sein du groupe. Les élus ne peuvent pas s’exprimer au sein du groupe. Quand je parle du respect des élus, c’est ça. [...] Les présidents de groupe ne se rencontrent jamais sur du fond. Ça, pour moi, ce n’est pas acceptable au nom de la démocratie. Un président de groupe politique, ce n’est pas rien. [...] Nous n’avons jamais été consultés politiquement sur la venue d’Agrexco à Sète. »

Éric Andrieu commentait aussi le fait que Georges Frêche ne lui avait pas donné la parole sur un de ses gros dossier (le SRADT) : « Un élu qui travaille trois ans et demi sur un dossier alors qu’il a associé les départements, les agglos, les chambres consulaires, les acteurs économiques et sociaux, les personnalistes de la région. Trois ans et demi ! Quand on méprise l’élu porteur du dossier – ce n’est pas lui d’ailleurs, moi vous savez je n’existe pas là dedans – mais tous ces gens qui ont bossé sur le dossier. Ce sont ces pratiques qu’il faut changer. »

Ces propos ont été tenus en réponse à une question du journaliste Jacques Molénat qui pointait le fait que les premiers fédéraux socialistes étaient tous conseillers régionaux voire vice-présidents. Extraits de la fin de l’échange :
JM : Tel que ça a fonctionné, ça a fait de Frêche, le vrai patron du PS régional.
EA : Tout à fait. Tant qu’il était au PS.
JM : Même à l’extérieur.
EA : C’est une bonne lecture.
Écouter l’intégralité de l’échange :

« Celui qui ne se rend pas
a toujours raison contre celui qui se rend. »

Le 2 octobre, après l’annonce de sa défaite, Éric Andrieu déclarait : « J’ai un truc qu’on m’a dit tout à l’heure que je trouve très juste : « Celui qui ne se rend pas a toujours raison contre celui qui se rend. » C’est de Charles Péguy. Donc je ne me rends pas mais on n’est pas en guerre. » Mais aussi : « Mon engagement n’est pas personnel, il est au nom du Parti socialiste et des valeurs que je porte. »

Qu’en est-il aujourd’hui ? Difficile à dire mais il y a 10 jours, lors de l’inauguration du local de campagne de Georges Frêche, Montpellier journal a interrogé Éric Andrieu sur sa position actuelle alors qu’il est en troisième position sur la liste de l’Aude dans l’équipe de Georges Frêche. L’audois dit être « légitimiste » et rappelle : « Le vote des militants s’est exprimé. » A-t-il obtenu des garanties sur la gouvernance de la région ? « Je ne suis plus trop dans le jeu des négociations. Ce qui m’importait c’est qu’au niveau du département de l’Aude, on se retrouve (3). C’est fait. Pour le reste je pense qu’il y aura des modifications des modes de gouvernance mais ce n’est pas à moi d’en témoigner. »

Envisage-t-il d’être vice-président ? « Je ne sais pas. Je ne l’exclue pas. Si le président nouvellement élu considère que je peux servir la région par de l’exécution sur tel ou tel secteur, il faut en discuter. Mais ce n’est pas une priorité en ce qui me concerne. » Et sur le fait que la gauche n’est pas rassemblée, il avance comme Georges Frêche, la présence d’écologistes (ex-Verts) et de communistes (dissidents du PC). Ce qu’on savait déjà en septembre. L’affront de la présentation du SRADT ? « Ça fait partie du jeu politique. Ce type de pratiques – je l’ai dit en son temps – n’a pas grandi le président de l’exécutif mais c’est comme ça. Pour autant, quand on est engagé, il faut accepter ce type de règles. »
Écouter l’intégralité de l’entretien du 23 janvier :

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(1) Lire sur ce point l’analyse du NPA et de L’Humanité, assez proche de celle d’Éric Andrieu. C’est aussi celle de Jacques Molénat, auteur de l’article reprenant la phrase sur Laurent Fabius et sa « tronche pas catholique ». Et celle de Maryse Arditi, vice-présidente de la région et membre de la majorité de Georges Frêche.
(2) Lire : Frêche-harkis : ce que la justice a vraiment dit.
(3) La fédération PS de l’Aude était jusqu’à l’été 2009 une fédération très unie.


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6 commentaire(s)

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  1. fabre said
    on 3 février 2010

    à 19 h 00 min

    J’avais cru que cet homme était courageux ,comme quoi on peut se tromper
    L’envie de rénovation du PS dans la région ,c’etait juste pour tenter d’etre le 1er socialiste ?
    Cher Eric ,tu nous a dit pendant la campagne pour le 1er socialiste ,avoir toujours soutenu GF même dans ses pires dérapages ,là au moins tu n’a pas changé
    J’espére pour toi que tu pourra monnayer au mieux ton soutien
    Vice président c’est surement bandant ,alors!!!!!!!
    Alain Fabre

  2. le Bedeau said
    on 4 février 2010

    à 14 h 32 min

    lui au moins il respecte le vote de la majorité des militants .c’est une belle leçon de respect de la démocratie …on ne peut en dire autant de HM et encore moins de MA qui envoi l’édile de Montpellier s’éclater contre un mur …

  3. Jacques-Olivier Teyssier said
    on 4 février 2010

    à 14 h 35 min

    Pour les non initiés : HM = Hélène Mandroux ; MA = Martine Aubry.

  4. Olivier34 said
    on 4 février 2010

    à 20 h 57 min

    Quand on avale une couleuvre, il vaut mieux enlever la peau.

  5. XAVE 11 said
    on 6 février 2010

    à 16 h 12 min

    Bravo au Conseil Fédéral de l’ Aude qui a décidé de soutenir la liste Freche avec une majorité écrasante. Il y en a assez de ces éléphants du PS ( énormes que par leur ambition) qui veulent trancher, décider, et imposer leur volonté à la place des militants et ainsi bafouer dans l’ Aude leur vote. Il ne pourrons rien pour empêcher l’ élection de Freche. Dans le Sud on a bien connu l’ Inquisition, et on sait la combattre. A bon entendeur salut. Et bravo Eric Andrieu.

  6. Observateur said
    on 8 février 2010

    à 0 h 25 min

    @Xave 11
    Vote à main levée, cela va de soit, … sûrement pour permettre à chacun de voter en conscience et en toute liberté.
    Vous pouvez parler de victoire écrasante, mais SVP, n’invoquez pas la démocratie et encore moins la lutte contre l’inquisition.
    Je ne pense pas qu’il reste encore beaucoup de lecteurs qui n’ont pas compris les particularités de la démocratie à la sauce du PS local.