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Le Mardi 1 décembre 2015 à 18:22

Régionales : Philippe Saurel n’est ni de gauche ni écologiste ni citoyen


Le candidat maire et président de la métropole de Montpellier ne cesse de le répéter : il serait « divers gauche, écologiste et citoyen ». Au-delà de son programme tout aussi indigent que celui des municipales, les faits – nombreux – contredisent le slogan. (1 730 mots)

Par Jacques-Olivier Teyssier

Philippe Saurel, candidat (divers droite) aux élections régionales de 2015 le 23 avril 2014 (photo : J.-O. T.)

Certains lecteurs non abonnés ou trop pressés peuvent penser que le choix de Montpellier journal de classer Philippe Saurel « divers droite » est une fantaisie. C’est tout le contraire. Il s’agit d’un choix éditorial réfléchi, argumenté et longuement expliqué dans ces deux articles qui totalisent 3 300 mots :

Politique sécuritaire
On pourrait se contenter de ces deux articles écrits il y a environ un an pour démontrer que Philippe Saurel n’est en rien « divers gauche » mais on peut aussi citer quelques nouveaux faits et gestes du candidat « hors parti » qui montrent que rien n’a changé. Ainsi de la politique sécuritaire de la majorité Saurel qui ne se limite pas au recrutement de nouveaux policiers municipaux qui vaut à Montpellier « de se positionner au 6e rang des polices municipales de France, après Nice, Lyon, Marseille, Toulouse et Cannes », comme le claironne fièrement l’adjointe à la sécurité dans le journal municipal d’octobre alors que Montpellier n’est que la 8e ville de France.

Cette politique sécuritaire qui est l’objet d’une incessante communication, ne se limite pas non plus à l’augmentation (+88 % en six ans) des caméras de vidéosurveillance – ou de « vidéoprotection » selon la novlangue de droite reprise par l’équipe Saurel. Récemment cette politique a en effet directement visé des personnes fragiles ou précaires. Ainsi l’arrêté dit de « tranquillité publique » signé par le maire en personne le 23 avril interdit dans le centre et les faubourgs « tout regroupement de personnes entraînant des occupations abusives et prolongées des rues et autres dépendances domaniales visées à l’article 4, accompagné ou non de sollicitations ou de quêtes à l’égard des passants » ou encore « toute consommation de boissons alcoolisées ». Conséquence : « Sur les 3 dernières semaines, ce sont plus de 200 verbalisations qui ont été appliquées par les policiers municipaux », se félicite la ville dans un communiqué (9/07).

Arrêté visant des personnes fragiles et précaires
Autre arrêté municipal visant des personnes fragiles et précaires : celui concernant la prostitution. Il a suscité plusieurs réactions négatives dont celle du Mouvement du nid. L’association qui agit « sur les causes et les conséquences de la prostitution » a qualifié, dans un communiqué, l’arrêté Saurel d’ « injuste et inefficace », « de réponse facile » qui « consiste à éloigner le problème ». L’adjointe à la sécurité a d’ailleurs reconnu sur France bleu Hérault (20/10) que c’était l’objectif poursuivi.

Philippe Saurel semble aussi bien plus intéressé par le monde de l’entreprise et ses patrons que par les pauvres. On ne compte plus les événements organisés pour ou avec les entreprises. Il y aussi « son » centre d’art contemporain qu’il présente avant tout comme un moyen de doper l’activité commerciale du centre-ville et donc des petits commerçants. La réfection des jardins du Peyrou (300 000 € pour la seule réfection des parterres fleuris, 1,5 M€ pour la réfection des sols, lire ici) qu’il justifie comme une satisfaction d’une demande des habitants du quartier (plutôt riches aux alentours de la rue Foch) plutôt que comme un atout touristique.

Quartier populaire vs pavillonnaire
En parallèle, les habitants du quartier Las Rébès, déjà très pourvu en immeubles et logements sociaux, se battent pour conserver un des rares espaces verts de leur environnement (lire ici et le blog du collectif). Philippe Saurel et son adjointe à l’urbanisme argumentent qu’il faut bien loger les gens et donc qu’il faut bien construire là-bas. Sauf que lorsqu’il s’agit d’une zone moins populaire – en l’occurrence une partie du quartier Croix d’argent – le maire déclare : « Dans cet espace, il y a beaucoup d’espaces verts puisqu’il s’agit d’une zone pavillonnaire. Il faut se mettre à la place des habitants qui voient pousser, tel un champignon immense, devant leurs fenêtres, 20 mètres de façades amputant les espaces verts. On a remis à l’équilibre le fonctionnement de ce quartier » (vers 2h45 de la vidéo) Idem pour le parc Montcalm que le maire a décidé de préserver et qui est bordé par des maisons et immeubles cossus. Mais à Las Rébès, les habitants attendent toujours.

Que dire encore des commentaires accompagnant la présentation de la décision de déménager le marché de la place Salengro ? Quand le maire et son adjointe ont insisté lourdement sur la nécessité de rechercher un « spécialiste du cochon » (lire ici). Il est des manières plus élégantes, moins racoleuses et moins stigmatisantes d’affirmer l’éventuel besoin d’une mixité commerciale surtout quand ces déclarations sont accompagnées de rires des élus de la majorité. Ces propos sont pourtant passés inaperçus. S’ils avaient été tenus à Béziers, on imagine les protestations.

« Rien de concret pour les Hauts de Massane »
Ailleurs, des habitants ou militants associatifs dénoncent l’abandon des quartiers populaires par le maire. « Cela fait quand même bientôt deux ans que Saurel a été élu… et il ne fait rien de concret pour les Hauts de Massane », déplore René Ribes, président du comité de quartier des Hauts de Massane (Midi Libre, 1/12). Quant au Petit Bard, il suffit de visionner le documentaire Justice pour le Petit Bard, pour mesurer la désillusion (lire ici).

Rappelons également l’épisode du manque de places dans une école de la Paillade où il était demandé aux parents chômeurs de laisser la place pour les enfants des autres. Il a fallu un article de Montpellier journal pour que la mairie prenne des mesures pour mettre fin à cette situation (lire ici). Toujours en matière scolaire, rappelons également que la cantine est plus chère pour les pauvres à Montpellier que dans des villes de droite (lire ici). Enfin, que dire d’une majorité municipale qui déjà privatise la gestion d’une crèche municipale, ensuite place en premier la question du coût dans l’accueil des tout-petits et enfin choisit un prestataire dont les pratiques sont mises en cause à plusieurs reprises dans d’autres villes (lire ici) ?

« Briser une grève »
Dernier épisode en date, la grève de personnels municipaux dans les écoles lors de la rentrée scolaire. Philippe Saurel n’a rien trouvé de mieux que d’avoir recours au vocabulaire de la droite en parlant de prise d’otages des parents et que de demander à ses élus de remplacer les grévistes. Dominique Mendez de Forces ouvrières a parlé « de méthodes despotiques et inacceptables » (France bleu Hérault, 2/09). Quant au maire, il s’est offert le plaisir de relayer fièrement un tweet d’Europe 1 disant : « L’astuce du maire de Montpellier pour briser une grève : remplacer les grévistes par des élus. »

On peut – provisoirement ? – clore ce chapitre sur le positionnement politique de Philippe Saurel et de sa liste en soulignant que non content d’avoir des élus de droite dans sa majorité municipale, il poursuit dans la même voie pour les régionales. Citons notamment Jean-Pierre Grand, le maire (Les Républicains) qu’il avait déjà soutenu aux sénatoriales, Gérard Christol, opposant de droite à Georges Frêche ou encore Jacqueline Galabrun-Boulbes, maire (divers droite) de Saint-Drézéry. Sans oublier l’ancien maire UMP de Lourdes avec lequel, nous dit Le Figaro (28/09), la campagne de Philippe Saurel « espère rebondir ».

« Vivre l’écologie en dehors des partis » ?
Philippe Saurel s’est aussi depuis longtemps auto-attribué le qualificatif « écologiste ». Stéphanie Jannin, son adjointe à l’urbanisme nous propose même, sans rire, de « vivre l’écologie en dehors des partis » avec la liste Saurel (Twitter, 28/08). À nouveau, les faits sont un peu loin de cette invitation à un merveilleux voyage. Un des derniers épisodes : les subventions aux compagnies aériennes low cost à la légalité très contestée par la Chambre régionale des comptes elle-même (lire ici). Le soutien indéfectible de Philippe Saurel au doublement de l’A9 qui va passer, excusez du peu, de 2×3 voies à 4×3 voies ce qui fait quand même 12 voies si on compte bien. Non, vous n’êtes pas aux États-Unis. La poursuite du soutien, délibérations à l’appui, de la nouvelle et très décriée gare TGV de la Mogère, de la desserte en tram et du quartier OZ associés.

Mais aussi le prolongement du tram jusqu’à l’aéroport alors que beaucoup de spécialistes affirment, chiffres à l’appui, que ce n’est pas pertinent (lire ici). Tout ceci est à mettre en parallèle avec le report à une date toujours indéterminée de la ligne 5 de tramway avec une priorité mise sur sur le « barreau ouest » c’est-à-dire le raccordement autoroutier entre l’A75 et l’A9 (lire ici l’avis du collectif Ligne 5). Mais aussi l’absence d’un vrai plan pour l’amélioration du réseau cyclable de Montpellier. Et on ne parle pas de celui de la métropole.

Barrage de Sivens
Au vu de tout ce qui précède, la déclaration de l’adjointe aux écoles rapportée par La Gazette de Montpellier (20/08) en deviendrait presque anecdotique : « Les repas végétariens à la cantine, ce n’est pas un combat passionnant. Ma priorité, c’est plutôt d’améliorer la qualité des repas. » Cerise sur le gâteau : rappelons que la liste Saurel compte dans ses rangs, Pierre Verdier, tête de liste dans le Tarn et qui était en charge du dossier du très contesté barrage de Sivens.

La liste Saurel serait aussi une liste citoyenne. Si pour être citoyen, il suffit de ne pas être encarté dans un parti politique ou espérer s’en faire exclure, la liste Saurel peut être qualifiée de citoyenne. S’il s’agit de ne pas prendre des professionnels de la politique, ça se complique : des vice-président(e)s de la métropole, des anciens élus, une attachée parlementaire, etc. sont sur la liste Saurel. S’il s’agit d’associer largement les citoyens aux décisions qui les concernent, c’est raté. Il faut dire que son programme est tout aussi indigent que celui des municipales. Philippe Saurel ne fait pas mystère d’avoir lui-même choisi ses têtes de listes, il ne manque pas une occasion de parler à la première personne. Entre les deux tours des élections ? Il dit qu’il réunira ses têtes de listes pour prendre une décision en cas de menace FN. On a vu plus citoyen.

Au niveau municipal, il est indéniable que Philippe Saurel a animé un nombre important de réunions dites de « concertation » mais elles relèvent plus souvent de l’information, de la mise en avant du maire qui veut apparaître comme connaissant bien sa ville, à l’écoute – en vue des prochaines élections ? – que d’une réelle participation des citoyens même si elle existe parfois. Que dire également de la futilité de certains thèmes de débats choisis ? « Choix des espèces florales pour remplacer des vases d’Anduze (rue Rosset), des arbustes (rue Foch) et la zone de stationnement non autorisé (face à la Poste) » (24/11). Ou encore le choix d’une aire de jeux (les habitants ont choisi le modèle « Coala », 7/07). Il arrive parfois que les habitants ne s’en laissent pas compter et préfèrent parler relogement, insertion professionnelle, propreté, sécurité, culture plutôt que cheminement piéton (lire ici).

A paraître avant le premier tour : un article sur le liste Delga (PS-PRG) et un sur la liste Onesta (EELV-Front de gauche).

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9 commentaire(s)

Suivre les commentaires de cet article

  1. michelCALVO said
    on 1 décembre 2015

    à 20 h 50 min

    Je viens d’apprendre la recherche d’un « spécialiste du cochon » par le maire à plein temps lors du transfert du marché Salengro à la place du plan Cabanes. Je ne sais pas quelles initiatives a pris l’administration pour mettre en oeuvre cet objectif, mais c’est à suivre finement car il y a une possible rupture des règles d’égalités et possible discrimination.

  2. nessus said
    on 1 décembre 2015

    à 22 h 57 min

    J-O Teyssier, je crois qu’on peut dire que vous vous placer clairement en adversaire politique de Philippe Saurel et cela à la veille même des élections régionales.
    le maire de Montpellier ne trouve aucune grâce à vos yeux dont le regard n’est plus , à mon avis, celui d’un journaliste. Ce qui m’étonne, c’est cette ardeur à combattre celui qui va s’avérer comme le grand perdant de ces élections prochaines. S’il n’a pas compris la leçon des élections départementales qui définissaient pourtant assez bien les limites de son influence, les régionales vont lui ramener les pieds sur terre . Et c’est une bonne chose car cela va le forcer à s’occuper du territoire montpellierain où tant reste à faire après la constitution de la métropole qu’on lui doit largement, ne l’oublions pas .

  3. Jacques-Olivier Teyssier said
    on 2 décembre 2015

    à 11 h 13 min

    nessus : Montpellier journal n’a pas « d’adversaire politique ». Pour éviter de me répéter, je renvoie les lecteurs à ces précédentes réponses : http://www.montpellier-journal.fr/2015/04/capitale-regionale-philippe-saurel-pointe-du-doigt-par-son-opposition.html#comment-7538

  4. Philogm said
    on 2 décembre 2015

    à 15 h 13 min

    Bonjour,

    sur le point particulier du vocabulaire vidéosurveillance / vidéoprotection.
    Malheureusement, et même si volontairement je dis toujours vidéosurveillance, tous les textes législatifs (même ceux d’origine) ont progressivement été modifiés pour « vidéoprotection ».
    Mais c’est vrai que les textes ont surtout été modifiés dans ce sens par la droite.

    J’avais fait un court argumentaire contre la vidéosurveillance dans mon village avec une courte étude à ce sujet. Je peux la fournir.

  5. Jacques-Olivier Teyssier said
    on 2 décembre 2015

    à 17 h 21 min

    Quand la « vidéoprotection » remplace la « vidéosurveillance » (lemonde.fr)

  6. yanhel said
    on 3 décembre 2015

    à 9 h 54 min

    Philippe Saurel a connu tous les travers du pouvoir hyper-personnel de G.Frêche, et s’en est nourri au point d’en faire son modèle politique. Puis, il se fait élire soi-disant avec des… « citoyens » et contre les partis (parce que ça l’arrange car il est viré du sien tellement il veut le pouvoir.) Or il ne s’agit que d’asseoir son pouvoir personnel sur les nouveaux-élus qui ne connaissent pas la politique et le suivent les yeux fermés ou alors se font à leur tour dégager( pour bien comprendre que est le chef). Ces élus viennent des milieux plutôt d’affaires ou de la bourgeoisie, que des militants engagés dans des luttes locales. Ph.S a de la chance, car il surfe sur la vague anti-partis qui traverse la société et gagne sur ces bases les élections par la défection de la gauche aux urnes. Cependant, il faudrait lui faire une formation accélérée de démocratie participative et citoyenne. Par exemple au Venezuela j’ai connu: » Las mesas de agua » « Los consejos de participacion local ». Et c’est bien autre chose que de décider des bancs de bd du jeu de Paume! Par exemple: les citoyens fixent eux-même le PLU de leur quartier. Choisissent eux-mêmes tel ou tel projet avec l’architecte de leur choix!… Cela en boucherait un coin à ceux qui nous ont défiguré le marché du Haut et à l’architecte attitré muti-millionnaire qui fait aussi marchand de logement social avec la ville. (époque de Saurel à l’urbanisme ) Tiens!… à quand un dossier sur ce thème? sur les réseaux immobiliers? Et sur les décisions « citoyennes » à sens unique comme la Mogère ou Oxylane? Le déni de citoyenneté est aussi fort venu d’un parti au pouvoir que d’un homme seul qui veut prendre toute les commandes. Nous sommes assez ingénus et aveugles pour tomber dans le piège et que le clientélisme fait le reste. Pensez-y avant dimanche.

  7. nessus said
    on 3 décembre 2015

    à 23 h 38 min

    Sur le jeu de Paume, c’était burlesque ! les emplacements étaient pré-définis par des rectangles dessinés au sol . Le mobilier ( chaises, banquettes et poubelles à déchets) était déjà sélectionné par Grand Coeur. La population était invitée à « s’exprimer » mais on ne sait trop sur quoi . bref, un simulacre !

  8. mjulier said
    on 5 décembre 2015

    à 0 h 37 min

    à michelCALVO: ça ne me choquerait pas que la mairie décide que le marché doive comporter au moins un charcutier, au moins un boulanger, au moins 2 maraîchers, etc… D’ailleurs il y avait un charcutier sur le Plan Cabanes, avant qu’il déménage sur la place Salengro. Un vrai charcutier qui vendait du pâté de campagne et de la saucisse de Toulouse: c’était pratique car le quartier est plutôt démuni en charcuteries.

  9. Jacques-Olivier Teyssier said
    on 5 décembre 2015

    à 8 h 33 min

    mjulier : on peut parler de charcuterie sans insister lourdement sur le mot « cochon » et sans déclencher de rires parmi les conseillers.