Skip to content


Le Mercredi 24 avril 2013 à 12:07

Les trois plus gros clubs sportifs de Montpellier et l’argent public (7/7)


Synthèse en accès libre des six volets de notre enquête de plusieurs mois sur le financement du MHSC (foot), MHRC (rugby) et MAHB (handball) par les collectivités locales. Les aides directes et indirectes, les principaux montants, les décisions illégales ou discutables, les moyens utilisés pour détourner les limites fixées par la loi, etc.

Hélène Mandroux, André Vezinhet, Christian Bourquin et Jean-Pierre Moure (photos et montage : J.-O. T.)

1/ Des aides directes ou indirectes discutées

« Le maintien d’une subvention municipale au PSG n’est ni nécessaire ni opportun dans un contexte de rigueur budgétaire. » C’est ce qu’écrivait en novembre dernier Bertrand Delanoë, le maire de Paris alors que des centaines de millions d’euros du Qatar affluent sur le club de foot de la capitale.

À Montpellier, on est très loin de cette position. D’abord parce que le budget du MHSC n’est pas celui du PSG (60 M€ contre 300 M€). Mais aussi parce que la position des élus semble différente. Par exemple celle de Jean-Pierre Moure, le président de l’agglo, qui justifie ainsi les énormes aides de sa collectivité à ces sociétés privées : « Le rôle de l’agglomération n’est pas d’aider un club professionnel. Il est d’aider à l’affirmation d’une politique sportive entendue au sens général : politique sportive, politique culturelle c’est-à-dire le public qui s’y adonne, ceux qui la pratiquent. Et ce qu’amènent le sport ou la culture en matière de lien social. »

Mohed Altrad, le très riche – 118e fortune de France en 2012 selon Challenges – président du MHRC viendrait presque contredire Jean-Pierre Moure : « On a augmenté le chiffre d’affaires de 30% depuis qu’on est arrivé et on a baissé les dépenses. L’idée c’est d’aller petit à petit dans ce sens-là. Et petit à petit espérer qu’on n’ait pas besoin d’argent public. Mais on en est loin. » Patrick Vignal, député PS et conseiller aux sports du maire de Montpellier, lui contredit clairement le président de l’agglo : « Je plaide pour que les collectivités ne financent plus le sport de haut niveau. »

Patrick Vignal, avant d’en arriver à cette conclusion déclarait : « Comment on fait en société si on achète des Thiago Silva [joueur du PSG]  à 700 000 € nets par mois ? Je ne comprends pas que les gens ne fassent pas la révolution. C’est payé en partie par les dettes publiques et donc nos impôts. » (JT du OFF, décembre 2012) Argument d’autant plus pertinent que la masse salariale représente une très grosse partie du budget d’un club sportif professionnel et que les retombées positives (économiques, sociales, d’images, etc.) de l’existence d’un club de l’élite pour une ville, un département, une région sont inconnues car jamais étudiées. Pourtant, comme on va le voir, les aides directes et indirectes sont énormes.

Soulignons qu’au MHSC, selon Louis Nicollin, le plus haut salaire est à 150 000 € par mois soit environ 150 fois le SMIC ou encore 1,8 M€ par an (références dans la revue de presse du 12 avril).

►Lire l’intégralité du premier volet : Des dizaines de millions d’argent public déversés pour des clubs sportifs privés

Louis Nicollin, Mohed Altrad et Rémy Lévy (photos et montage : J.-O. T.)

2-3/ Les redevances cadeaux des stades

Alors que les équipements sportifs sont payés par l’argent public, les clubs sportifs utilisateurs payent une redevance. Mais celle-ci est souvent ridicule par rapport aux montants des investissements consentis par les collectivités locales et des bénéfices tirés de leur exploitation.

En 2017, il aura été ainsi investi sur le stade de la Mosson lors des 20 dernières années pas moins de 70 M€ soit une moyenne de 3,5 M€ par an. De plus l’agglomération de Montpellier en supporte les coûts de fonctionnement et la maintenance. Deux exemples : 95 500 € par an de nettoyage et plus de 500 000 € payés en deux ans pour la pelouse. Et le MHSC ne paye que 271 314 € de redevance par an. Le constat est assez proche pour le stade Yves du Manoir et le MHRC. Selon les calculs prudents de Montpellier journal, la redevance pourrait s’élever à 1,3 M€ pour chacun de ces deux équipements. Soit un manque à gagner pour l’agglo de 2 M€ par an. Ou, selon comment on voit les choses, une aide indirecte du même montant à ces deux clubs.

►Lire l’intégralité du deuxième volet : Stades : les redevances cadeaux payées par les sociétés privées MHSC et MHRC

Pour le hand, les montants sont moins importants car le palais des sports Bougnol est plus petit. Mais ce sont quand même environ 300 000 € qui ont échappé à l’agglo et à ses contribuables car l’équipement – au mépris de la loi – a été mis à disposition du MAHB gratuitement de 2003 à 2006. Ceci a été pointé par la chambre régionale des comptes. Mais cela ne semble pas avoir ému grand monde dans le monde journalistique, politique ou associatif.

►Lire l’intégralité du troisième volet : Le MAHB survivrait-il si la loi et les règles du privé lui étaient vraiment appliquées ?

4/ Mandroux a-t-elle bradé Grammont à Nicollin ?

Cette opération pourrait se résumer en deux chiffres : 6,5 M€ pour le prix de vente de l’ensemble du site d’entraînement de Grammont et 4,5 M€ pour le prix de seulement deux terrains de remplacement, les tribunes, vestiaires et locaux de maintenance associés. Le site de Grammont c’est 10,7 ha de terrain et notamment huit terrains de jeu, 1400 m2 de vestiaires, 4000 m2 de parkings, 2300 m2 de locaux, le tout vendu donc par la ville de Montpellier au MHSC au prix de 6,5 M€. Ce prix est à peu près celui préconisé par France domaine qui ne représente qu’un minimum mais pas un maximum. Bref, si on fait la soustraction, l’opération n’aura donc rapporté à la ville que 2 M€. Une bonne négociation ? On attend de voir ce que la chambre régionale des comptes en dira dans quelques mois.

►Lire l’intégralité du quatrième volet : Hélène Mandroux a-t-elle bradé le site de Grammont à Louis Nicollin ?

5/ Des revenus des joueurs pris en charge par les collectivités

239 200 € par an. C’est ce que verse chaque année l’agglo à Fabien Galthié, l’entraîneur du MHRC, en contrepartie de l’utilisation de son image. Celui-ci dispose pourtant déjà d’un salaire confortable de 500 000 € par an. Mais Jacques Martin, le vice-président de l’agglo en charges des sports, le reconnaît lui-même : « Pour que les clubs puissent garder ces champions, il fallait que le droit à l’image soit récupéré par les collectivités. C’est ce que nous avons fait. La présence de Galthié c’est un plus pour le club, beaucoup plus que pour l’agglomération mais elle en bénéficie indirectement. »

Même dispositif pour les joueurs François Trinh-Duc et Fulgence Ouedraogo pour 113 000 € chacun et par an. Concernant Nikola Karabatic, ex-joueur star du MAHB, le prétexte de l’exploitation de son image a été utilisé par le club pour justifier la participation des collectivités (1 M€) à son transfert du club de Kiel (Allemagne) pour un montant total de 1,5 M€. Mais finalement seule la ville a exploité l’image du joueur. Aujourd’hui bien dégradée (lire quid des millions d’argent public investi dans l’image du MAHB ?) après l’affaire des paris suspects toujours en cours d’instruction.

►Lire l’intégralité du cinquième volet : Image de Karabatic : comment l’agglo et la région ont payé 600 000 € pour rien

6/ Plus de 12 M€ d’aides directes aux trois clubs

Pour le MHSC seul, ce sont pas moins de 5 M€ d’aides directes via des achats de prestations et des subventions pour « missions d’intérêt général » qui lui sont versées par les quatre collectivités locales. Pourtant, depuis son titre de champion de France 2012 et sa participation à la Ligue des champions, le club se porte bien : « On s’est gavé », a même déclaré Louis Nicollin, son président (Le Progrès, 18/04).

Mais les collectivités ne se sont pas contentées d’aider un club en bonne santé (budget 2012/2013 de 60 M€ contre environ la moitié la saison précédente), elles ont même dépassé le plafond légal d’achat de prestations fixé par la loi. C’est ainsi plus de 100 000 € de trop qui ont été versés pour la saison 2012/2013. On attend ce que va en dire la préfecture qui est chargée du contrôle de la légalité des décisions prises par les collectivités. Sollicités par Montpellier journal, aucun des directeurs généraux des services (Jules Nyssen pour la ville, Christian Fina pour l’agglo, Jean-Michel Paris pour le conseil général et Claude Cougnenc pour la région) n’a fourni d’explication à ce dépassement ni n’a présenté de mécanisme pour la régulariser.

Signalons aussi que certaines collectivités ont leur chouchou : le MAHB pour la ville et le MHRC pour le conseil général. Le maire Hélène Mandroux était un temps très amie notamment avec Patrice Canayer, le manager général du club. Quant à André Vezinhet, le président du conseil général, il est le beau père de Thierry Pérez, l’ancien président du MHRC. Un lien de cause à effet ? Les intéressés s’en défendent. On peut noter aussi que la région verse 800 000 € pour le centre de formation du MHSC quand elle ne donne que 45 000 € au MAHB.

Les achats de prestations ce sont aussi les loges où les élus assistent en VIP au match. Ainsi, le MHRC facture aux collectivités 192 € pour l’« hospitalité » par personne et par match c’est-à-dire pour le traiteur et on ne sait quoi d’autre. Auxquels il faut ajouter 106 € pour la place elle-même. Et il faut multiplier ces deux chiffres par 30 puis par 16 matchs et par 4 collectivités. Mais ce n’est qu’une partie des prestations achetées dont le montant total pour les quatre collectivités et les trois clubs  s’est élevé à 5,6 M€ pour la saison 2011/2012.

►Lire l’intégralité du sixième volet : Plus de 5 M€ d’aides publiques directes au club de foot de Louis Nicollin

► Lire aussi :


Publié dans Politique, Sport business. Mots clés : , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , .

Un commentaire

Suivre les commentaires de cet article

  1. jpcrassous said
    on 24 avril 2013

    à 17 h 45 min

    Merci pour ces articles détaillés et précis sur le financement des sport(if)s de haut niveau de Montpellier par nos collectivités locales ; est-ce bien leur rôle ? Je ne crois pas. Mais nos collectivités locales n’étant jamais, ou rarement, rappelées à l’ordre ni sanctionnées, pourquoi voulez-vous que cela change ?